L’iPad, un objet de convergence

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Le produit est enfin lancé! Les geeks vont s’en donner à cœur joie, les uns vont dénigrer, les autres porteront aux nues ce nouvel objet de la galaxie Apple. En intégrant et en fédérant les cultures du Web qu’il a pour partie suscité, l’entreprise à la pomme est le premier éditeur à rendre possible un portail payant plurimédia suffisamment simple pour qu’il devienne le passage obligé de la majorité des consommateurs. Qu’il provienne des cartons de cet éditeur importe peu, même si le bébé fleure bon le talent encore une fois. Ce qui est remarquable, c’est la convergence des fonctions sur une même plate-forme alimentée par un catalogue riche d’emblée d’applications et de séquences multimédias. Les briques plus ou moins récentes étaient là, devant nos yeux, nous les utilisions toutes plus ou moins, wifi, iTune, Remote, iPhoto, hébergements distants, et enfin, l’iPhone, cette grosse brique en forme de répétition générale.

Le fédérateur de nos comportements dématérialisés est arrivé : l’iPad peut à la fois satisfaire les utilisateurs réticents d’ordinateurs surdimensionnés pour leurs besoins et légitimer pour la première fois l’offre numérique globale grâce à une grande simplicité d’utilisation. Le parcours a été long, pour ne prendre que l’aspect audio du monde virtuel, nous sommes passés de l’ère du média objet payant au dématérialisé « fatalement » gratuits. Nous avons cru à la fin du modèle économique de l’édition. En criant à « Mort aux majors qui font de l’argent sur le dos des artistes », nous étions convaincus de la complicité entre consommateurs et créateurs, mais les premiers condamnaient les seconds à une mort certaine.

Initialement, la commercialisation des techniques numériques avait été orchestrée avec prudence. Le CD-audio est sortie en 1979. Pour convaincre le consommateur, c’était un support « tournant » à l’analogie entretenue avec le disque vinyle. Le lecteur Philips était une machine où l’on plaçait le disque sur le dessus et il était équipé d’un couvercle transparent pour de voir tourner le « disque ». J’ai déjà rappelé la phrase du PDG de Philips à Eindhoven, en 1979, en pleine commercialisation du CD-Audio, à qui on présentait les performances d’une mémoire statique d’une capacité d’enregistrement de 60 minutes. il avait répondu « Cachez moi ça pendant dix ans! ». La nouveauté numérique ne devait pas tuer trop vite la poule aux œufs d’or analogiques! Puis, tout a dérapé, Philips a vendu son catalogue musical Polygram en même temps qu’il commercialisait un graveur de CD au même prix que les anciens lecteurs. Tout est allé aussi très vite via le Web, avec les plate-formes de type Napster, offrant et partageant gratuitement sans état d’âme l’accès aux catalogues musicaux. Nous avons été rapidement plongés dans l’ère du « ce qui est techniquement possible, nous le faisons ». Le numérique fut pour beaucoup synonyme de gratuité et d’indépendance. Le législateur s’en est ému, sensibilisé par des éditeurs traditionnellement attentistes depuis l’invention du disque!

Mais le consommateur ne peut accepter d’emprunter une voie complexe s’il remarque des chemins de traverse plus courts et plus faciles pour atteindre la musique qu’il recherche. Jusqu’à aujourd’hui, on ne lui facilitait pas sa vie … de consommateur numérique!

Premièrement, l’iPad vise la consommation des flux numériques par le plus grand nombre en rendant possible une transaction payante. Le second point est la constitution d’un catalogue gigantesque disponible à la sortie de l’appareil. Evidemment, iTune et AppStore ont été des laboratoires d’essais fabuleux pour la mise au point de ce nouveau modèle économique.

Enfin, cette machine est présentée astucieusement comme une chance pour les médias de se refaire une santé financière au moyen d’une interface à laquelle ils n’avaient pas pensé (voir l’article de Jean Cassagne, in « Image fixe et image animée sont dans un bateau… » lire).

L’iPad est sûrement une réponse qui intègre le constat que la seule manière de modifier les comportements est d’offrir plus de fonctionnalité et de confort et non d’interdire. Avec l’antériorité de belles réalisations depuis le Macintosh de 1985, il y a là le développement d’une véritable culture de l’imprégnation des nouveaux comportements.

Ceci montrera peut-être que tous les efforts du législateur pour imposer de nouveaux comportements disciplinés et légaux feront moins que la sortie d’une nouvelle offre commerciale intuitive en totale adéquation avec la sensibilité contemporaine. Faut-il finalement s’en réjouir, je ne sais pas, mais les acteurs du vieux monde apprendront peut-être qu’il faut être talentueux pour sentir la société et prévoir ses comportements, et surtout qu’il faut la satisfaire pour la convaincre.

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