Photographes, nous sommes tous des informateurs!

Installation du câble par l'opérateur Free (FTTH) - Photo Daniel Hennemand, 2011

C’EST QUOI CETTE TENTE POURRIE? C’est notre opérateur bien aimé Free qui installe dans ma rue ses fibres optiques juteuses pour le business du XXIème siècle. Merci Free! Il y a un mois, j’avais déjà un soutier sous le trottoir d’en face pour le compte d’Orange. Merci Orange! Si nous étions grossiers, nous dirions que la mutualisation des moyens ils se la mettent quelque part.

Un petit post familier, hier sur Facebook, ça fait toujours plaisir ! En archivant cette image, je l’ai classé parmi les visuels non signifiants, c’est-à-dire dépendants d’un commentaire; sans connotation particulière ou celle-ci serait erronée.

La géolocalisation, tout le monde connaît
Cette image, présentée seule devient muette. D’où cette réflexion dans un premier temps sur la manière dont on doit archiver l’information et la transmettre. La nécessaire légende embarquée dans un champ de métadonnées; chacun sait cela. Mais dans un second temps, j’ai repensé aux champs de géolocalisation inscrits dans nos images de smartphones et autres boîtiers.
Un nouvel échange avec Patrick Peccatte* a ravivé ma conscience à la fois du caractère opérationnel de ces enregistrements automatiques GPS et de notre rôle de fournisseur d’informations souvent inconscient.
Si la publication d’une photographie légendée est comprise comme un acte maîtrisé, un geste d’auteur, publier une image riche d’informations de géolocalisation revient à faire remonter des données non prioritaires ou inconnues par le photographe lui-même; des métadonnées discrètes en quelque sorte.
Cette caractéristique n’est pas nouvelle. Elle est d’ailleurs valorisée depuis plusieurs années par les plates-formes de partage d’images, mais faut-il considérer ce phénomène comme anodin sans rapport avec l’acte de partage d’une photographie ou bien faut-il s’interroger sur ses effets à venir ?
Aujourd’hui, la fonction est intégrée aux boîtiers ou le sera bientôt et elle agit là où on ne l’attend pas forcément.
Révélation
Cette tente installée sur le trottoir m’interpelle. Ici, j’interfère dans l’action d’un technicien qui câble un quartier pour le compte de l’opérateur Free; rien ne le laisse supposer, il faut que j’interroge l’acteur de la scène. Je rapporte le fait. Nous savons que Free consacre des sommes colossales dans la mise en place d’un réseau câblé et nous savons qu’Orange et SFR procèdent de même.
En interrogeant donc, j’apprends – et je diffuse – que Free installe ses câbles dans cette zone. J’avais interrogé un premier technicien « Orange » il y a deux mois. Les deux ont bien voulu m’informer sur leur mission. Le second m’a confirmé les dires du premier. Le passage de gaines contient effectivement un premier réseau de fibres optiques.
L’image accompagnée de ces données de  localisation apporte et diffuse une information peu inaccessible. Le lecteur apprend les faits suivants :
  • L’opérateur Orange a équipé ce quartier
  • Free double cette installation
  • Les mutualisations risquent d’être problématiques => cela peut être assimilé à un grand gâchis
D’autre part, l’employeur du technicien peut être averti de la diffusion de cette information et peut en prendre ombrage. Dans ce cas, je fais remonter une information risquant de fragiliser la personne qui me l’a confié.
Résumons. La publication sur le réseau d’une image rendue signifiante par un court texte prend une autre dimension parce qu’elle est géolocalisée. Ce n’est plus un simple apport esthétique, c’est une information rendue bien plus riche par la mise en relation d’un événement, d’un état et d’un lieu. Faut-il  débrancher notre service de localisation automatique, comme nous effacions il y a quinze ans nos cookies, déjà par esprit de méfiance candide ?
Sommes-nous des informateurs bénévoles ou de futurs dénonciateurs chroniques ?
Daniel Hennemand, v1.2.1
* Patrick Peccatte, le spécialiste français des métadonnées de l’image

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